Garland
Ericka Beckman
Scott Benzel
Andrew Cameron
Guendalina Cerruti
Alex da Corte
Charlotte Houette
Karen Kilimnik
Sherrie Levine Signe Rose
Adam Stamp
Michael Zahn
Il y a quelques années, je me suis sentie en proie à la magie du solstice d’été. J’ai soudain compris l’importance de conserver ses traditions : cueillir, assembler et tisser des fleurs en bouquets et couronnes pour un effet onirique.
Voyez-vous, les Scandinaves croient que la veille de la Saint-Jean, si vous cueillez douze fleurs sauvages à mettre sous votre oreiller, vous verrez votre véritable amour dans votre sommeil. Bien que je ne sache pas quoi dire de l’apparition du véritable amour, si ce n’est que cela ressemble à un conte de bonne femme, l’idée que les actes d’accumulation puissent générer des significations personnelles et mythiques offrait une méthode convaincante de création d’exposition – en trouvant des liens et des perceptions, comme le disait Jonathan Blow de son jeu vidéo au temps réversible Braid, où la vraie magie a lieu « subjectivement, dans l’esprit du joueur ». J’ai songé à la façon dont les glissements culturels morphent les contes de fées en entrelaçant l’angoisse contemporaine dans le tissu familier des histoires pour s’endormir, et comment de tels récits se chargent d’une valeur projective. Après tout, l’identité d’une guirlande est inséparable de son assemblage. Cela commence par quelques brins simples, des sélections de fleurs, de branches ou de clinquants. Un élément est choisi, un élément est ajouté. Puis un autre, et encore un autre, suivant une logique saisonnière, et, parfois, sémantique, jusqu’à ce que tout soit tressé en une couronne promise. Comme la structure narrative d’un conte de fées, Garland se meut avec l’illogisme des rêves – cette compulsion kafka-esque qui arracha Alice à sa chaîne de marguerites au pays des merveilles, ou ailleurs attira Keats vers sa Belle Dame Sans Merci, Dorothy dans Oz par des coups de pieds étincelants, et toute la bande du songe d’une nuit d’été dans ces forêts sans nom à l’écart d’Athènes. Pour les curieux, les enchantés, les amoureux fous, les affligés, ceux qui sont submergés par la surproduction de la culture ou ceux qui désirent simplement désirer, c’est souvent dans l’abandon même de la logique causale que l’on laisse le sens se faire par des négociations continues et évolutives, historiquement liées mais entièrement idiosyncratiques. Le sens est changeant et insaisissable ; nous le suivons au fond du terrier du lapin.
Jouant sur la forme paratactique des contes de fées, Garland est né d’un désir de contempler les merveilles que l’on pourrait extraire de l’iconographie culturelle pop, tandis qu’elle se charge de signification au fil du temps. Essayant de clarifier quelque chose à propos du sentiment d’étourdissement (ou d’éblouissement ?) que procure notre façon d’interpreter, revisiter et revoir nos icônes contemporaines, je me suis tournée vers une autre Garland, à savoir Judy, pour considérer le sort durable que Dorothy a jeté sur la culture dans The Wizard of Oz. Il s’avère que Judy est absente de l’exposition, à moins que vous ne l’écoutiez attentivement murmurer de l’autre côté : « Je crois en l’idée de l’arc-en-ciel. Et j’ai passé ma vie entière à essayer de m’en remettre. » Judy est le fantôme qui dément la fabrication de Garland ; elle sert de rappel à croire en plus que la simple revendication institutionnelle à la signification. Alors que la pluie d’été fait sombrer nos coquelicots dans le sol et que nous considérons les frayeurs et les tragédies de la saison, la façon dont la culture est mythologisée, appropriée et perdue dans les rituels permanents de fictions démêlées et reconstituées, Garland est un hommage à Judy et à sa conviction dans ce sacré arc en ciel, une tentative pour saluer le fantasme, la fandom et le mirage des histoires, en gardant à distance le mémento mori de la culture.
Invoquant les Cocteau Twins : “Garlands evergreen / Forget-me-not wreaths / Chaplets see me drugged / I could die in a rosary.” (« Guirlandes de feuilles persistantes / Couronnes myosotis / Des chapelets me voient drogué / Je pourrais mourir dans un rosaire. » )
Pour le solstice d’été cette année, une guirlande ; la nuit porte conseil, voyez ensuite.
L’exposition est rendue possible par le prêt de la FRAC Poitou-Charentes.